La grotte aux esprits

Les peintures rupestres des grottes ornées datent de plusieurs dizaines de milliers d’années. Nous ne savons pas avec certitude déchiffrer le sens de ces dessins. Première forme connue d’expression artistique, scènes de chasses, bestiaires, gratitude ou dévotion aux esprits des animaux ? Aujourd’hui ces peintures nous fascinent. Elles sont une part lointaine de l’identité de l’Humain. Elles interrogent notre rapport au temps, dans une époque qui semble se fuir elle-même tellement elle accélère.

Peau 2

Les rituels chamaniques tels que décrits par l’ethnologie sont des rituels de négociation. Négociation avec les esprits de la nature qui peuvent être généreux si l’on leur octroie une contrepartie, qui peuvent être cruels si l’on ne remplit pas sa part du marché. Ils s’insèrent toujours au sein d’une organisation sociale et d’une relation avec un environnement particulier.

Peau 1

Aujourd’hui nous ne sommes plus les chasseurs qui négocient avec les esprits des animaux pour s’assurer une bonne prise. Nous sommes devenus les proies, chassées par des algorithmes, esprits de notre époque qui s’immiscent jusque dans notre intimité. Ils influencent nos goûts et nos comportements. Ils deviennent de nouveaux guides pour nous rendre plus efficaces, nous éviter de choisir tout en nous donnant l’illusion de le faire, nous apporter notre supplément de dopamine à chaque notification. En nous indiquant le chemin le plus court, ne détruisent-ils pas les détours poétiques, le hasard, les errances nourricières ? Ils semblent vouloir devenir notre nouvelle transcendance.

Grotte

La grotte aux esprits est une bulle de lenteur, un lieu d’immersion où des algorithmes inoffensifs guident les changements de couleurs de centaines de petites diodes électroluminescentes. Ces lumières sont projetées sur des peaux de bêtes. Elles reproduisent le rythme lent des nuages sur des écrans organiques et réintègrent une part d’aléa pour créer des scénographies vivantes.

Cette grotte programmée est une tentative de connexion à notre part animale, de réconciliation entre nos outils modernes et notre capacité à la contemplation.